31 décembre 2010

Pearltrees : l'organisation d'une bibliothèque ouverte

Pearltrees est un outil visuel très sophistiqué mais gratuit d'édition (voire de curation) permettant d'organiser des contenus en grappes de données, selon une thématique particulière. Ces grappes de données, appelées des perles, viennent à former un arbre (la thématique) d'où le nom  "arbres de perles" ou Pearltrees.

Le curateur de contenus est un éditeur qui cherche, filtre, organise et présente des informations selon des attentes et des contextes particuliers. (Si vous n'êtes pas encore familier avec ce terme, voir mon billet à ce sujet ici).  La curation de contenus vise d'abord des objectifs qualitatifs, stratégiques et sociaux. Pearltrees permet ce traitement particulier de l'information.

Pour voir de quoi il s'agit, voici mes perles organisées selon une des mes thématiques favorites intitulée: Curateur de contenu. Cliquez sur l'image pour l'agrandir.


On remarque qu'à titre d'utilisateur de Pearltrees, ma thématique "Curateur de contenu" ainsi que mon avatar sont placés au centre dans une perle plus grande que les autres. En périphérie, on retrouve diverses plus petites perles ou ressources du web (billets, articles, analyses, etc.) que j'ai triées et que je juge pertinentes. On y retrouve aussi des pearltrees d'autres utilisateurs avec lesquels je partage des affinités pour la thématique en question.

Ainsi, en bas de mon avatar du côté gauche, on retrouve le Pearltree (et l'avatar) de Patrice Lamothe intitulé "Content Curation" ainsi que celui de François Rocaboy  (son avatar est une banane) intitulé simplement "Curation". Notez bien que Lamothe et Rocaboy sont respectivement CEO et directeur du marketing de la Start-Up française. 

Voici un autre de mes pearltrees créé suite à l'affaire Wikileaks de décembre 2010:



On remarque à droite de l'écran mes 16 perles reliées à l'affaire Wikileaks (j'ai pu en ajouter d'autres depuis...). À gauche, il s'agit de mon profil contenant les données au sujet de mon Pearltree : nombre de perles, de visionnements, de commentaires et de prises, etc.

Une prise, c'est lorsque quelqu'un d'autre vient chercher une de mes perles pour enrichir son propre arbre...de perles.

Voici un exemple de notification de prise de perle. Je reçois ce message par courriel.


Notez bien le morceau de puzzle bleu - au bas de ma photo/avatar de la 2e image à partir du haut - avec la mention Faire équipe. Depuis la mi-décembre 2010, Pearltrees permet- via Twitter, Facebook ou par courriel- d'inviter des amis ou des abonnés à faire équipe dans l'élaboration d'un Pearltree. Cette fonction de travail collaboratif demeure une des plus intéressantes et ouvre la voie à la construction d'une curation à plusieurs et en temps réel.

Voici un exemple d'invitation via Twitter:


Bien entendu, l'outil permet de jeter un coup d'oeil sur une des perles sélectionnées (par mouse-over). Ci-dessous, un billet de Clay Shirky faisant partie de mes perles.


Chacune des perles peut aussi être annotée ou commentée dans le but d'offrir davantage de contexte à la curation.

On aura donc compris que l'ambition de Pearltrees consiste à offrir, entre autres, un web organisé par l'esprit humain, voire des rayons entiers consacrés à une thématique particulière : la période bleue de Picasso, le cinéma français de la première moitié du 20e siècle, les diverses formes de méditation, la physique quantique, etc.  Sky is the limit ! On peut donc organiser le web dans une grande bibliothèque personnelle (composée de Pearltrees) dans laquelle les rayons (dossiers et thématiques) peuvent être enrichis et partagés.

Comment élaborer des arbres de perles ?

On peut le faire de plusieurs façons:

Depuis l'application même...



À partir du compte de quelqu'un d'autre quand on est en mode recherche ( il faut être connecté), on a qu'à "prendre" une perle (ou plusieurs) et la mettre dans son panier... pour la replacer ensuite dans son propre arbre...


À partir du widget (bookmarklet) intégré au fureteur (une des meilleures solutions)...


Le premier (parmi les boutons bleus de gauche à droite) permet d'ajouter une perle dans une thématique déjà ouverte (lors d'une session de travail Pearltrees), le second permet de choisir l'endroit exact où on veut placer la perle (à la suite d'une découverte fortuite par exemple) et le dernier permet d'ouvrir son compte.

Le moteur de recherche interne de Pearltrees permet d'accéder aux perles des autres utilisateurs, par affinités de perles, mais il va sans dire qu'une recherche exhaustive doit faire appel à une multitude de moteurs et d'annuaires. D'ailleurs, Pearltrees marque un certain retour vers l'organisation humaine de la recherche et du tri, un peu comme Yahoo! le faisait à ses tout débuts. 

Il existe aujourd'hui tellement d'informations, notamment à cause du phénomène des contenus générés par les utilisateurs (UGC), qu'il faut aujourd'hui pouvoir compter sur la qualité de l'information et non plus seulement sur la quantité. C'est ce que font les curateurs de contenus: offrir des informations pertinentes au bon moment, aux bonnes personnes et selon des variables et des contextes particuliers.

Pearltrees: un outil pour le grand public ?

Parce qu'il faut d'abord apprivoiser l'interface cartographique (ce que je fais depuis près d'un mois) qui ne repose pas sur un format traditionnel de liste, d'ordre alphabétique ou de Timeline, Pearltrees n'est pas destiné aux impatients ni aux gens pressés.  La courbe d'apprentissage demeure assez à pic; il faut du temps pour en bien saisir les fonctions de base et le modus operandi. Il intéressera par contre les chercheurs, les cyberthécaires, les analystes et les veilleurs qui veulent se donner la peine de comprendre un outil social très sophistiqué de curation.

Je vous conseille donc au moins de faire l'essai de Pearltrees et de vous donner du temps pour en comprendre les rudiments, surtout si vous comprenez bien l'utilité de la curation de contenus. Par ailleurs, je n'ai fait que présenter les fonctions de base de l'outil. Il y en a d'autres et les programmeurs planchent sans doute sur la bonification de l'interface et des fonctions. Une version pour iPad serait d'ailleurs prévue pour 2011...



Pour accéder à mes Pealrtrees: http://www.pearltrees.com/lerouxpa


Enfin,  je remercie François Rocaboy qui a eu la gentillesse de m'accorder une entrevue à la fin de novembre 2010.

Informations complémentaires

Pearltrees dans Wikipedia

Pearltrees (TechCrunch Disrupt)

L'ère des "curators" aurait-elle sonné ?


Merci de votre lecture et bonne année 2011 !

15 décembre 2010

Médias sociaux 101 : le Best-Of de Michelle Blanc

Ce n'est qu'en fin de semaine dernière (11 décembre 2010) que j'ai débuté ma lecture du livre Les Médias sociaux 101 de Michelle Blanc.  Je le sais. Je suis en retard mais certaines contraintes professionnelles et personnelles m'y ont tenu à l'écart... Je ne voulais pas non plus en faire une lecture trop rapide et, le cas échéant, en rédiger un compte rendu expéditif.

Pourtant, je me l'étais procuré dès son lancement, le 27 septembre dernier. En fait, je m'en suis procuré deux exemplaires, un pour moi et un autre que j'ai fait tirer sur Twitter à l'intention de mes étudiants. C'est Frédérik Nissen qui l'a remporté, un des méchants garnements des interwebs. Je savais bien, même sans l'avoir lu, que ce livre marquerait une étape charnière dans la très jeune histoire des médias sociaux au Québec.

Laissez-moi vous dire tout de suite que je connais Michelle Blanc personnellement depuis très peu de temps mais que j'apprécie ses billets depuis mes premières lectures en 2007-2008. Cette époque correspond à peu près au moment où j'ai commencé à m'intéresser plus sérieusement au phénomène des médias sociaux. Pourtant, ce n'est qu'au début de 2009 que j'ai commencé à bloguer et que je me suis plongé non seulement dans des recherches et des lectures mais aussi dans l'essai de divers canaux et applications de médias sociaux.

Que s'est-il donc passé ? Comment ai-je pu prendre autant de retard ? Moi qui dès 1991 recevais ma première adresse de courriel et apprenais quelques codes élémentaires du système Unix de l'Université pour utiliser Lynx et accéder à un Internet sans images ?

Mais surtout, comment avais-je pu louper la vague des médias sociaux, moi qui avais créé le cours REP2400 Internet et relations publiques en 1999 ? Pourquoi donnais-je toujours un cours de Web 1.0  à l'automne 2008 et par le biais du système fermé WebCT ? Pourquoi m'étais-je mis en position de Very Late Adopter ? Par doute ? Par perplexité ? Par paresse ?  Par le réconfort d'un cours déjà monté et maîtrisé (enfin presque) ?

J'ai dû me rendre à l'évidence. Je participais, à l'échelle micro et personnelle, au retard de deux ans du Québec (estimé ici par Michelle Blanc) quant à l'adoption des nouvelles technologies et des médias sociaux en particulier. J'ose croire que je me suis rattrapé au cours des 12 à 16 derniers mois et que mon retard se compte dorénavant en mois plutôt qu'en années...

Ce rattrapage, je le dois, bien entendu, à ma prise de conscience de ce nouvel écosystème social-numérique qui ébranlent tous les domaines de l'activité humaine. Mais je le dois aussi à l'influence de gens comme Claude Malaison et bien entendu, de Michelle Blanc, sans oublier tous les autres blogueurs et analystes chevronnés du Québec 2.0, de la France et des États-Unis.

Quand je pense à ma lecture des Médias sociaux 101, je n'ai qu'un seul regret: celui de ne pas l'avoir entamée plus tôt.  Pourquoi ? Parce que j'y ai découvert des informations que j'ignorais et des pistes de réflexion qui m'avaient échappé. Un exemple pour le démontrer: j'ai donné ma dernière séance de cours portant sur la gestion de crise durant la semaine du  6 décembre 2010. J'aborde, entre autres, le cas de la crise de la listériose de Maple Leaf de 2008 et je montre comment la vidéo de son président sur YouTube marquait une nouvelle ère dans la communication en temps de crise.

Cependant, j'avais oublié le "détail" des mots clés et l'achat, par un cabinet d'avocats spécialisés en recours collectif, des mots "listeria" et "Maple Leaf", au plus fort de la crise...(Voir le chapitre intitulé L'entreprise, le Web et les médias sociaux: la peur de perdre le contrôle de son message). C'est d'autant plus curieux puisque je suis sensible à cet élément stratégique du référencement (organique il est vrai mais tout de même). D'ailleurs, j'en fais référence dans mon cours sur les relations avec les médias et j'ai presque écrit un billet dans la section Commentaires du propre billet de Michelle Blanc portant sur les communiqués de presse optimisés...

Bien que ce livre soit tiré des quelque deux milles billets rédigés depuis 2005, il s'agit certainement d'un best-of. C'est-à-dire une compilation des billets les plus éclairés et éclairants en matière de médias sociaux et de leurs répercussions sur les rapports humains, les entreprises, les communications-marketing (dont les relations publiques), la politique et le journalisme.

Sur ce dernier point, il semble que certains n'aient pas très bien digéré le chapitre sur le journalisme et les médias. Pourtant, à lire l'article de Nathalie Collard paru le 13 décembre 2010 intitulé Le correspondant à l'étranger 2.0, où la journaliste cite abondamment une étude de l'Institut Reuters, Michelle Blanc vise dans le mille en reprenant les recommandations d'Edward Roussel...  La seule référence absente de ce chapitre, à mon avis, et ne serait-ce que pour son apport historique, est Dan Gilmor et son We the Media de 2004, que je crois être aussi important que le Manifeste des évidences et La longue traîne. Mais cela, ça se discute...

Les Médias sociaux 101 n'est pas un "How to..." mais plutôt un "Why be...". Sans dénigrer l'importance du comment et des moyens pour le faire, je crois qu'au stade où nous en sommes, et dans une perspective purement pédagogique, le pourquoi demeure plus pertinent que le comment. Et sur ce plan, le livre de Michelle Blanc atteint admirablement bien la cible.

Depuis le trimestre d'hiver 2010, j'exige de mes étudiants qu'ils créent un blogue personnel. Cette activité compte pour 50% de la note finale; c'est dire l'importance que j'y accorde.

Vais-je vous surprendre si je vous dis qu'à peine 10 %, et dans le meilleur des cas 15% de mes étudiants avaient déjà un blogue ?  Sur mes 30 étudiants du trimestre d'automne 2010, quatre seulement rédigeaient des billets, et ce, plus ou moins régulièrement. Pour des étudiants en communications et relations publiques, les avantages de se bâtir un porte-folio numérique n'ont plus à être démontrés. Mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Chez les jeunes d'une part, mais également chez les plus vieux pour qui le blogue peut révéler toute l'expertise et, par ricochet, assurer à l'entreprise une mémoire...

Dans cette optique, j'ai été agréablement surpris par ce tweet de mon collègue Guy Litalien à propos de sa lecture récente des Médias sociaux 101 :


Je suis aussi ravi de vous annoncer que les plus persévérants et motivés de mes étudiants apprécient  le blogue, en comprennent la pertinence pour leur carrière et poursuivent l'activité au-delà du cours. Par contre, plusieurs étudiants me font également part des craintes de leur employeur dès que la nouvelle se répand. Plusieurs organisations voient leur blogue d'un mauvais oeil et c'est très regrettable.

C'est ici, encore, que Michelle Blanc fait oeuvre utile en nous rappelant que le plus grand risque, pour une organisation, c'est justement d'ignorer les médias sociaux.

Par ailleurs, quelques critiques s'en sont pris un peu bêtement à la forme de l'ouvrage plutôt qu'au fond. On semble avoir oublié que les médias sociaux sont d'abord et avant tout une question de fond. Sur ce plan,  ce premier ouvrage  n'a rien à se reprocher, bien au contraire.

Son recueil de billets prend la forme d'un récit. Michelle Blanc raconte ses histoires et partage ses meilleures références en misant bien entendu sur le potentiel des médias sociaux mais aussi en nous mettant en garde contre ses écueils. Elle le fait avec lucidité, authenticité, humour, transparence et générosité. Ce sont bien là quelques-uns des ingrédients pour réussir les communications de demain.

Je vous conseille donc d'aller chercher votre exemplaire dès que possible, pendant qu'il en reste encore. Cette première édition vaudra bien un jour son pesant d'or, ne serait-ce que pour sa profondeur et sa valeur historique.

Faites-en aussi cadeau à votre entourage professionnel ou à tout beau-frère ou toute belle-soeur qui douterait encore de l'importance et de la pertinence des médias sociaux à l'aube de 2011.



Merci de votre lecture !

Patrice Leroux
 
Creative Commons License
patriceleroux by patrice leroux is licensed under a Creative Commons Attribution-Noncommercial-Share Alike 2.5 Canada License.
Based on a work at patriceleroux.blogspot.com.