28 février 2010

Une vérité qui dérange version relations publiques ?

Si je reviens sur cet excellent pastiche réalisé par des professionnels en relations publiques du Royaume-Uni (dont Adam Parker de RealWire), c'est que l'enjeu des relations avec les médias fait toujours rager bon nombre de journalistes et de blogueurs... ainsi que les vrais professionnels en RP qui ont compris depuis longtemps comment s'y prendre avec les médias.


Envoi de communiqués sans permission et sans rapport avec le champ d'intérêt du journaliste (ou du blogueur), pratique d'envoi par courriel plus que douteuse, rappel téléphonique inutile (le fameux "suivi") ne sont que quelques éléments qui polluent l'atmosphère des relations avec les médias...


Voyez plutôt...


An Inconvenient PR Truth from RealWire on Vimeo.

Un rapport de recherche plus complet (statistiques à l'appui) est disponible sur SlideShare:
http://www.slideshare.net/realwire/inconvenient-pr-truth-survey-report

Malgré la "controverse" de la campagne, il semble bien que les praticiens du Royaume-uni la soutiennent selon cet article de PR Week. Aux USA, on la reçoit avec une certaine tiédeur...toujours selon cet autre article du même PR Week...

Bien entendu, nous ne sommes pas, ici non plus, à l'abri de pratiques douteuses en relations avec les médias. Voici par exemple une capture d'écran d'un courriel que mon ami Michel Munger me faisait parvenir en mai 2008. À l'époque, Michel était encore chez lapresseaffaires.com (il écrit maintenant pour le Canal Argent).

 
Encore tout récemment, Michael Arrington de TechCrunch y allait d'une autre charge à l'encontre d'une personne peu scrupuleuse qu'il nomme affectueusement un PR Spammer: I pissed Off a PR Spammer Today...







Va-t-on devoir inciter les blogueurs à insérer un tel avertissement comme le proposait PR Squared en 2008 ?

Plus sérieusement, la campagne An Inconvenient PR Truth propose une Charte des droits (Bill of Rights)  contenant 10 articles. J'en ai fait une rapide traduction.


An Inconvenient PR Truth Bill of Rights
Charte des droits (Traduction libre)
Article 1 -Permission
L’envoi d’un communiqué de presse se fait seulement après avoir obtenu la permission explicite d’un destinataire;
Article 2 – Désabonnement d’une liste d’envoi
Tout destinataire dont le nom apparaît sur une liste d’envoi, de manière volontaire ou non, doit pouvoir en faire retirer son nom rapidement et facilement (voire automatiquement), sur demande;
Article 3- Fiabilité des «listes commerciales» de médias
Tout professionnel en RP ne doit pas se fier exclusivement aux listes commerciales de médias pour cibler des destinataires;
Article 4- Lire et comprendre la nature de la publication et le type de sujet couvert par le destinataire
Avant toute correspondance ou envoi, s’assurer d’abord de bien comprendre la nature de la publication et le type de sujet traité par le destinataire. Il faut donc lire plusieurs articles ou billets, au préalable. On s’assure ainsi que l’envoi de matériel correspond à ses champs d’intérêts et demeure pertinent.
Article 5- Souci du détail
Le destinataire doit s’attendre du professionnel en RP qu’il puisse détailler convenablement son champ d’intérêt, et de façon spécifique,  plutôt que de le catégoriser en des termes généraux tels que «technologie» ou «consommation»;


Article 6- Types de communiqué
Un destinataire devrait recevoir uniquement des communiqués susceptibles de l’intéresser véritablement (selon son champ d’intérêt spécifique) et non des communiqués qui ont trait à l’ensemble de l’industrie dans laquelle son champ d’intérêt spécifique peut faire partie.
Article 7- Rappel téléphonique de suivi
Après avoir reçu un communiqué, le destinataire ne doit pas s’attendre à recevoir un rappel téléphonique du professionnel en RP. De tels rappels font perdre du temps à tous et n’ont aucune incidence sur l’utilisation éventuelle du communiqué pour en tirer un article ou bulletin de nouvelles.
Article 8- Titres concis 
Le destinataire doit s’attendre à pouvoir lire des titres concis dans le but de prendre une décision rapide et éclairée sur la nature du communiqué.
Article 9- Un formatage clair
Le destinataire doit s’attendre à recevoir des communiqués par courriel dont le format permet de découvrir rapidement les faits saillants de l’information (sommaire en liste à puce, liens pertinents, contacts, etc.)
Article 10- Pas de fichiers annexés
Le destinataire ne doit pas s’attendre à recevoir un communiqué ou tout autre contenu dans un fichier annexé au courriel.
Qu'en pensez-vous ? Est-ce utile ou futile ?
Mon prochain cours ( que je ne peux donner à cause de la grève des chargés de cours de l'Université de Montréal) portera également sur cette épineuse question des relations avec les médias... 


J'y aborderai aussi l'enjeu des communiqués dit de médias sociaux, les communiqués vidéos (et leur histoire peu reluisante aux USA avec le phénomène des fake news). 


Je parlerai d'une campagne Internet de relations avec les médias de 1999 (oui 1999 !) réalisée pour le compte de Bombardier. On verra à quel point rien ne peut remplacer la créativité, la pertinence et la personnalisation des relations pour assurer le succès d'une campagne...


Merci et bonne lecture !


Patrice Leroux



11 commentaires:

Matthieu Sauvé a dit…

Patrice,

Très intéressant billet. Toujours intéressant de pouvoir lire quelque chose qui a une perspective critique. Et si je peux ajouter un grain de sel, il se trouve au moins un autre élément qui "pollue" l'atmosphère des relations avec les médias : les communiqués "vides", i.e. qui n'ont aucun intérêt et qui n'auraient jamais dû être écrits. Il n'y a qu'à faire défiler le menu du jour de n'importe quel fil de presse pour se rendre compte de l'ampleur du phénomène. À mon avis, cette pratique est possiblement au nombre de celles qui nuisent le plus à la réputation des RP.

Matthieu

Patrice Leroux a dit…

Bonjour Matthieu,

En effet, la gestion des relations avec les médias demeure toujours épineuse sinon parfois carrément malhabile ou tordue. Il semble y avoir toutefois beaucoup de pression de la part des clients pour diffuser des communiqués (y compris les "vides" dont tu parles). Il appartient aux praticiens de raisonner les clients sur cet enjeu (dont la question de la réelle valeur de la nouvelle) et de leur proposer d'autres moyens. Ce n'est pas simple car les relations avec les médias représentent (et sont encore chez certains) le coeur et les poumons de leur travail. Mais les praticiens plus habiles réussissent habituellement à convaincre leur client que le communiqué de presse (selon un contexte particulier) n'est pas toujours la meilleure tactique qui soit...

Aurélie Alaume a dit…

What have I done to reduce my irrelevance today? excellente question que nous devrions-nous poser dès aujourd'hui et qui devrait devenir un avertisseur au moment d'envoyer/ de solliciter l'attention de ceux que nous "ciblons".
Si moi-même je précise sur ma boite aux lettres: pas de sollicitation, pourquoi potentiellement devenir celle qui distribue les porspectus dans ma vie professionnelle?...hum, très intéressant.
merci monsieur Leroux!

Patrice Leroux a dit…

Aurélie,

Si cela vous intéresse, vous trouverez davantage d'informations à partir de mes notes de cours déposées le 3 mars 2010 sur SlideShare:

http://www.slideshare.net/lerouxpa/relations-medias

Merci.

PL

Guillaume Francoeur a dit…

Très intéressant billet monsieur Leroux,

Je suis un peu surpris d'apprendre que la pratique du suivi téléphonique est à proscrire, d'autant plus qu'un de mes professeurs me signifiait cet automne que c'était une étape normale, voire essentielle, de l'envoi d'un communiqué de presse.
Est-ce une pratique qui était courante avant et qui n'est devenue condamnable que récemment?

Merci de m'éclairer sur le sujet maintenant, avant que la mauvaise habitude ne soit vraiment formée :-)

Patrice Leroux a dit…

Guillaume,

La pratique du "suivi téléphonique" après l'envoi d'un communiqué semble encore assez courante chez certains praticiens. Toutefois cela a toujours ennuyé les journalistes. Toujours ! Il vaut mieux laisser tomber cette pratique archaïque même si certaines exceptions demeurent possibles. Si votre communiqué comporte une véritable nouvelle digne d'intérêt, c'est vous qui risquez de recevoir un appel...

Merci.

PL

Martin Véronneau a dit…

Patrice, votre billet est d'un très grand intérêt. J'y ai trouvé plusieurs points fort pertinents.

Je suis d'une part de ces relationnistes de presse. J'ai une entreprise qui se spécialise dans le milieu de la culture. Malheureusement, ce problème de "pollution" vient effectivement nuire à notre travail. J'ai toujours porté une énorme attention à la façon de communiquer et au contenu que j'envoyais aux médias. Cependant, je dois dire bien objectivement que ce n'est pas le cas de tous. L'éthique de travail et le désir de le faire de façon consciencieuse n'est pas donné à tous.

Récemment, un client me demandait pourquoi je n'envoyais pas davantage de communiqués pour parler de son événement, mentionnant au passage que "tel autre événement en était rendu à 8-9 lui". Vous comprendrez donc qu'on doit parfois revenir de loin...

Je confirme par ailleurs l'information du vidéo qui mentionnait que les médias ne prennent plus le temps de lire les communiqués non pertinents. Ma femme est recherchiste pour une importante émission de radio et reçoit des dizaines de ces communiqués qu'elle supprime sur le champs, sans avoir lu la moindre ligne. Sans compter les titres de courriels qui sont trop génériques pour qu'on sache de quoi il s'agit...

Je suis professeur en communications et me suis toujours fait un devoir "d'éduquer" mes étudiants à l'importance d'être pertinent. Aujourd'hui, j'aurai votre billet comme exemple.

Merci !

Patrice Leroux a dit…

Martin,

Je vous remercie de votre commentaire.

PL

Guillaume Francoeur a dit…

Toujours par rapport au suivi téléphonique, est-il plus pertinent dans le cas d'une convocation à une conférence de presse ou est-il à proscrire dans tous les cas?

Désolé d'utiliser votre blog pour ces questions, avec la grève c'est le meilleur moyen que j'ai trouvé pour communiquer avec vous.

Patrice Leroux a dit…

Guillaume,

L'appel téléphonique n'est pas plus pertinent dans le cas d'une invitation à une conférence (rayez le mot CONVOCATION de votre vocabulaire); on ne convoque jamais les journalistes, on les invite... Encore là, si l'invitation demeure pertinente (du point du vue journalistique évidemment) et comporte des éléments intéressants liés à une véritable nouvelle digne d'intérêt, c'est vous qui risquez de recevoir un appel...

Merci.

PL

Guillaume Lachance a dit…

Toute la question de l'éthique professionnelle est tellement importante. Merci pour ce billet, il est très bien structuré.

 
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