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Alors même que le navigateur Mosaic faisait à peine son entrée dans Internet et révolutionnait le web, les auteurs John Arquilla et David Ronfeldt publiaient leur "Cyberwar is coming"(1993).
On y prédisait un avenir d'opérations militaires dans lequel du code informatique ferait partie des moyens d'attaque. On mentionnait aussi que le phénomène du "Netwar" affecterait des sociétés entières.
La "guerre de l'information" vise à modifier, à déstabiliser ou à troubler ce qu'une population cible connaît ou pense qu'elle connaît.
Dans cette optique, Emerson T. Brooking et P.W. Singer signent un article dans la revue The Atlantic de novembre 2016 intitulé War Goes Viral - How Social Media is Being Weaponized.
Malgré les espoirs d'une Renaissance numérique permettant de réseauter avec de nouvelles personnes de partout au monde et de pouvoir se confronter à de nouvelles idées, il semble que les comportements numériques soient largement dominés par l'homophilie (dans le sens sociologique du terme).
Force est d'admettre que l'écosystème socio-numérique ne met pas aux défis nos préjugés ni nos biais mais les renforce plutôt... Très peu d'empathie donc, avec des gens différents de nous mais une socialisation très forte avec ceux qui partagent notre point de vue...
Ce phénomène est d'ailleurs bien en évidence par l'entremise du projet "Blue Feed, Red Feed" du Wall Street Journal qui collige des actualités Facebook selon l'orientation libérale (démocrate) ou conservatrice (républicaine)...
L'EI et les médias sociaux
L'EI aurait réussi à recruter pas moins de 30,000 combattants venus d'une centaine de pays (dont de nombreux pays occidentaux) pour aller joindre ses rangs grâce aux médias sociaux.
On apprend même que la ville de Moussoul aurait été prise, en partie, à cause de la propagande de l'EI (avec Twitter et Instagram en particulier) et son utilisation (ou sa réappropriation) de mots-clics transformant de petites batailles en grandes victoires... Assez pour instiller une panique chez ses opposants (beaucoup plus nombreux par ailleurs, curieusement).
Le succès viral de l'EI est même comparée aux tactiques utilisées pour mousser des lancements d'albums de chanteurs populaires américains...
Russie, Chine et Turquie (entre autres !)
Si la Russie demeure la grande pionnière de la désinformation avec ses "usines à trolls" et sa grande machine à propagande Russia Today (ici en français), d'autres pays comme la Chine et la Turquie ne sont pas en reste.
La Chine emploierait près de 2 millions de censeurs et de trolls pour protéger le pays contre les menaces d'informations externes. La prochaine vague, selon des rumeurs (fondées ou non) implique un "système de crédit" permettant de déterminer si on est un bon citoyen chinois ou non...
Ce qui est intéressant avec la Chine, c'est que parfois les ultras se retournent parfois même contre le régime qui les a créés... (voir ici).
Du côté turc...on retrouve aussi des brigades de Twitter Trolls mais dans l'ensemble, ce qui s'y passe est assez désolant depuis les événements de juillet 2016 par rapport à la liberté de la presse...
Les objectifs centraux demeurent toujours les mêmes: occuper le territoire de l'information (ou de la désinformation); mobiliser les citoyens et supporteurs en faveur des positions de l'État (quel qu'il soit); et tant mieux si on accroît la fibre nationaliste...
Enfin, la National Academy of Sciences of the USA publiait au début de 2016 cette étude: The Spreading of Misinformation Online.
Le danger, avec ces informations qui connaissent une soudaine popularité - ou viralité - c'est qu'elles ne sont pas toujours précises, vérifiées ni mêmes véridiques...
Tout cela fait beaucoup plus peur que les petits monstres qui viendront cogner à ma porte en cette soirée de l'Halloween...
Merci de votre lecture !
Patrice Leroux